Avril : mois de l’éducation mathématique

Nos voisins du sud, par le biais du Joint Policy Board for Mathematics (JPBM) et du National Council of Teachers of Mathematics, désignent aux États-Unis le mois d’avril comme étant le mois de l’éducation mathématique. Pour les intéressés, il est possible de télécharger une affiche [en] imprimable au format 8,5 x 11.

Affiche Math Aware 2005
Il me semble qu’une initiative de la sorte pourrait très bien être reprise au Canada où la dernière grande campagne publique pour les mathématiques remonte à l’an 2000 au moment où l’UNESCO l’avait proclamé «Année mondiale des mathématiques». Quoique, comme le mentionne l’éditorial 194 de Math-École,

le montant alloué par l’UNESCO pour cet événement était de 20 000 $. La «nouvelle économie» nous avait fait oublié qu’il existait des sommes aussi dérisoires !

Il est donc grand temps, à mon avis, de redorer le blason de cette discipline trop peu appréciée par les jeunes (parfois avec raison, malheureusement, compte tenu entre autres du rôle de sélection sociale et de mécanique procédurale à l’extrême que l’on fait jouer aux mathématiques – j’y reviendrai certainement lors d’un futur billet).

La valeur «utilitaire» des mathématiques étant d’emblée reconnue par la quasi-totalité des gens dans notre société moderne, il faut faire place à la beauté et au plaisir des mathématiques.

Cadeaux à moi de moi

Il y a deux semaines, je me suis enfin décidé à passer à cette technologie. Si la gestion de votre temps est un véritable casse-tête (horaire, échéances, tâches, etc.), cet outil vaut de l’or. Après maintes hésitations, je me demande vraiment pourquoi je n’ai pas fait le saut plus tôt. Je sens que je vais devenir très dépendant de ce petit bidule…

Parlant bidule technologique, j’ai reçu samedi mon autre cadeau à moi de moi de ce mois-ci. Humm… J’aime.

La seule ombre au tableau dans tout cela : mon budget de ce mois-ci vient d’en prendre pour son rhume 🙂

Questionnement sur del.icio.us

Cela fait un certain temps que j’entends parler via plusieurs carnets du principe des «social bookmarks» de del.icio.us. Aujourd’hui, à la lecture du billet de Remolino (Backup del.icio.us), je me suis questionné sur ce service.

Mon problème vient du fait que je n’ai trouvé aucune réponse à mes questions… même après avoir cherché. Ok, j’ai peut-être cherché trop rapidement, mais cela devrait être visible au premier clic de souris sur la page d’accueil du site. Quoiqu’il en soit :

  1. qui supporte, ou encore comment est supporté, del.icio.us ($$$)?
  2. quels sont les termes de la licence? Au fait, où est-elle?
  3. est-ce un «environnement» propriétaire ou libre?
  4. y a-t-il quelque chose qui indique que del.icio.us ne deviendra pas commerciale?

Que de questions sans réponse…

Les barrages d’Hydro-Québec

Je suis d’accord avec Gilles en vrac quant à son billet sur la couverture médiatique entourant la sécurité des barrages d’Hydro-Québec. Ok pour le premier reportage mais, étant donné la démesure que cela prend maintenant :

Hydro-Québec a aussi lancé hier un appel demandant aux journalistes de cesser leurs «tentatives d’intrusion» dans ses centrales et barrages, et ce pour leur propre sécurité. (La Presse, 18 février 2005)

, on en arrive au constat de Gilles :

Quand les journalistes FONT la nouvelle, plutôt que d’aller la débusquer vraiment là où elle est, c’est la cote d’écoute et non l’intelligence qu’on vise, surtout lorsque ce qu’on titille c’est la peur du quidam.

Ce qui me désole aussi dans tout cela est l’incapacité à trouver un juste milieu. Alors que l’on pouvait visiter ces incroyables barrages, on apprend que cela ne sera désormais plus possible.

Hydro-Québec a notamment annoncé l’interruption de toutes les visites de ses installations. (La Presse, 18 février 2005)

C’est triste. Serions-nous devenus paranoïaques à ce point?

J’espère seulement que ces mesures drastiques concernant les visites ne seront que temporaires.

Albert Jacquard, Société Gatineau Monde et «Cité éducative»

À la lecture d’un billet de La Fouine, j’apprends que le grand homme qu’est Albert Jacquard prononcera une conférence intitulée «L’héritage de la vie : Du temps individuel au temps collectif» le jeudi 12 mai 2005 à l’auditorium du Cégep de l´Outaouais. C’est une belle occasion à ne pas manquer. Je compte bien tenter d’y assister.

Dans son billet, La Fouine indique également que cette conférence est organisée par la Société Gatineau Monde. Un peu intrigué, je clique donc sur le lien menant au site web de la dite «Société» afin d’en apprendre davantage et ainsi satisfaire ma curiosité.

La Société Gatineau Monde (SGM) est une initiative de citoyennes et de citoyens soucieux d’enrichir la vie culturelle et intellectuelle de l’Outaouais. Être à l’affût des idées novatrices est une nécessité dans une société changeante et troublée. C’est aussi un plaisir qui se partage, comme vous le savez, vous qui aimez réfléchir et débattre d’idées. La SGM se donne pour mission d’animer l’espace public en offrant l’occasion aux gens de toute la région de dialoguer avec des penseurs, des humanistes d’ici et d’ailleurs qui savent cerner les enjeux de notre époque et nous les faire comprendre.

Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai la vive impression que cela intéresserait un certain Remolino constamment à la recherche de nouvelles briques pour construire son projet de cité éducative. Je dis cela comme ça, en passant, ce n’est qu’une impression 😉

Capsule «Des nombres pour le dire» : Les battements de votre coeur et Wal-Mart

Saga Wal-Mart : encore, encore et encore.

Considérant que notre cœur bat à un rythme d’environ 60 pulsations/minute, on obtient donc 31 536 000 pulsations/année (i.e. 60 pulsations/min. x 60 min/hre x 24 hres/jour x 365 jours/année).

Considérant que Wal-Mart réalise environ 255 milliards de dollars US de chiffre d’affaires par année, on obtient, grosso modo, un chiffre d’affaires de 315 milliards de dollars CND (selon le taux de change actuel).

C’est donc dire que Wal-Mart transige près de 10 000$ à chacun de vos battements de coeur…

7,7 milliards $, ça change pas le monde, sauf que…

Scandale, quand tu nous tiens! Après le scandale des commandites, voici poindre* le scandale des fondations. Décidément, le cas du fédéral est loin de s’améliorer. Il suffit d’y penser 2 secondes (bon, ok, moins d’une seconde) pour voir que cela n’a aucun sens, mais vraiment aucun, que 7,7 milliards $ de fond public soit hors de tout contrôle de vérification comptable. Y a-t-il seulement une seule compagnie au monde qui adopterait une telle gestion de ses finances???

7,7 milliards, c’est des sous ça. Parlant de sous, si vous aviez à compter 7,7 milliards en sous, combien de temps cela vous demanderait-il? En supposant que cela demande 1 seconde pour compter chaque sous et que vous pouvez compter jour et nuit sans aucune pause, cela vous prendrait 244 ans et 2 mois pour compter un tel magot.

(*) : Touche d’ironie, car : «C’est la septième fois en huit ans que le bureau de la vérificatrice générale dénonce vivement, dans des rapports officiels, la propension du gouvernement à utiliser les fondations pour atteindre ses objectifs». (Source : Cyberpresse, 15 février 2005)

Raisonnement mathématique et formation citoyenne

Texte de présentation du thème du colloque GDM 2005 (les 3 et 4 mai à l’Université du Québec à Montréal) reçu via la liste d’envoi.
GDM: Groupe des didacticiens des mathématiques du Québec.

Le citoyen des sociétés industrialisées est appelé chaque jour à utiliser des systèmes de plus en plus complexes, pour lesquelles ses connaissances techniques et instrumentales sont vite dépassées, et qui requièrent une flexibilité et adaptabilité de la pensée sollicitant fortement sa capacité à raisonner. Pour être un citoyen responsable et un consommateur avisé, il doit notamment avoir une compréhension minimale des lois, réglementations, contrats, modes d’emploi, et de leurs mécanismes d’application.

L’étude et la recherche dans des domaines comme ceux de la pharmacologie, de la biochimie, des biotechnologies etc., ou moins spécifiquement dans la plupart des domaines des sciences humaines, ne sont guère possibles sans une maîtrise adéquate du raisonnement inductif. Par ailleurs, le développement important des technologies de l’information et la place prépondérante qu’y occupe la programmation informatique créent dans nos sociétés un besoin pressant pour une main d’oeuvre hautement qualifiée, apte à comprendre et gérer des structures logiques de nature essentiellement déductive. Il s’en faut de beaucoup que le raisonnement déductif trouve là sa seule utilité.

Quelle place doit occuper le raisonnement dans l’enseignement des mathématiques ? Y a-t-il des types de raisonnements propres aux mathématiques ? Y a-t-il des raisonnements indispensables à la formation d’un citoyen intègre, autonome, critique et responsable, dont l’apprentissage relèverait essentiellement de l’enseignement des mathématiques ? Y a-t-il des types de raisonnements mathématiques dont l’apprentissage relèverait plus spécifiquement de l’enseignement primaire ? De l’enseignement secondaire, collégial ou universitaire ?

Les concepteurs des programmes du Ministère de l’Éducation du Québec considèrent pour leur part que l’enseignement de la géométrie constitue un lieu privilégié où initier l’élève aux « … exigences de rigueur, d’exactitude, de justification et de preuve » (MEQ, Math 436, p. 3). Ces exigences ne pourront aller qu’en augmentant, quand on sait que le nouveau programme du secondaire fera de la compétence « Déployer un raisonnement en mathématiques » l’une des trois compétences fondamentales. Dans le nouveau programme du primaire déjà en place, la compétence « Raisonner à l’aide de concepts et de processus mathématiques » joue également un rôle central. Comment la manière d’aborder les concepts et processus mathématiques doit-elle évoluer du primaire au secondaire, pour que les raisonnements progressent jusqu’à rencontrer ces « exigences de rigueur, d’exactitude, de justification et de preuve », caractéristiques de l’activité mathématique ? Cette progression peut-elle se faire sans entraver chez l’élève le développement de l’intuition, de l’imagination, de la créativité, de l’inventivité, dont on reconnaît maintenant qu’elles doivent elles aussi faire partie intégrante de l’activité mathématique, pour peu qu’on la veuille riche et stimulante ?

Qu’est-ce qu’une preuve ? Qu’est-ce que la rigueur ? Est-il trop tôt pour envisager preuves et rigueur au primaire ? Pourquoi les mathématiciens — avec parmi eux les rédacteurs de programmes — associent-ils si spontanément preuve et géométrie ? Quels apprentissages liés au raisonnement mathématique permet l’étude de la géométrie, que ne permettrait pas l’étude des autres branches comme l’arithmétique, l’algèbre, les probabilités et statistiques, les mathématiques discrètes… ? Ces branches sollicitent-elles des types de raisonnements qui leur seraient spécifiques ? La programmation informatique sollicite-t-elle des raisonnements mathématiques spécifiques ? Est-ce que les nouvelles technologies ont un rôle à jouer dans l’enseignement du raisonnement mathématique ? Dans une perspective plus large, ont-elles un impact sur l’évolution de celui-ci ?

Pour R. Duval (1995), l’apprentissage de la démonstration (la preuve formelle) passe par la capacité à juger de la validité d’un raisonnement selon des critères intrinsèques, c’est-à-dire autres que l’apport d’informations empiriquement validées ou l’établissement d’un consensus au sein d’un groupe. Cela n’est possible selon lui que si l’élève accède à une « pratique écrite de l’écrit » (2001, p.197) faite de pauses, de retour sur les propositions déjà énoncées, de réaménagements et simultanéisations (pour rapprocher des propositions ou blocs de propositions non contigus dans le texte), de recul, d’appréhension globale (pour saisir certains éléments de macro-organisation) ; bref, de réflexion. Toutes choses que ne permet pas cette « linéarisation de la pensée » (op. cit., p. 191) imposée par une pratique orale du texte, faite de fluence, de séquencialité, d’irréversibilité. À travers une telle « pratique écrite de l’écrit », l’élève produit le texte de démonstration non plus à des fins de communication, mais pour « en contrôler et la validité, et l’absence de lacunes » (op. cit., p. 197). Avant Duval, Balacheff (1987) avait parlé d’une adhésion de l’élève-étudiant à une position théorique, au centre de laquelle celui-ci met la connaissance plutôt que la nécessité de convaincre « l’autre », et où prévaut sa très personnelle et simple satisfaction intellectuelle.

On objectera que la majorité des élèves n’a pas besoin d’une maîtrise aussi poussée de la démonstration, et que la rationalité « … fondée sur le dialogue et orientée vers la régulation des interactions sociales » (Duval, 2001, p. 204) — qui s’exprime entre autres à travers ce que les didacticiens conviennent maintenant d’appeler l’argumentation — est suffisante à la formation d’un citoyen éclairé. Au citoyen qui souhaite, dans les sphères où il déploie ses activités, organiser de manière optimale le travail de réflexion préalable à toute prise de décision, refusera-t-on le plus sophistiqué des outils de contrôle de la rationalité qu’est le raisonnement déductif ? Comment amener l’élève à en avoir une compréhension opératoire, au sens de Fischbein (1982) ; c’est-à-dire telle que les mécanismes logiques sous-jacents parviennent, dans l’entendement de l’élève, à une forme de cognition directe, globale, efficace et immédiatement disponible ? Peut-on donner à l’élève accès aux savoirs de logique formelle sans inhiber sa capacité à recourir à l’imagination, à l’intuition, aux associations, aux analogies, aux métaphores ? Si oui, comment préparer cet accès au primaire et l’aménager, le cas échéant, au secondaire ?

Le GDM vous convie à réfléchir et apporter des éléments de réponses à toutes ces questions, ainsi qu’à celles qui viendront inévitablement s’ajouter au fur et à mesure de nos échanges.

– Balacheff, N. 1987. Processus de preuve et situations de validation. Educational Studies in Mathematics, Vol. 18, n°2, mai 87, p. 147-176.
– Duval, R. 1995. Sémiosis et pensée humaine. Éditions Peter Lang, coll. Exploration, recherches en sciences de l’éducation. Berne, Suisse.
– Duval, R. 2001. Écriture et compréhension : Pourquoi faire écrire des textes de démonstration par les élèves ? In Produire et lire des textes de démonstration. Collectif coord. par É. Barbin, R. Duval, I. Giorgiutti, J. Houdebine, C. Laborde. Ellipses. Paris.
– Fischbein, E. 1982. Intuition and Proof. For the Learning of Mathematics, n°3, vol. 2 (novembre), p. 9-19.